Quel est le point commun entre Cristiano Ronaldo et la LPP ? Tous deux ont fêté en ce début d’année leur 37e anniversaire. C’est grâce notamment à un travail acharné et à une communication bien rodée, que la superstar portugaise reste un des meilleurs joueurs du monde. Sa façon de communiquer unique et innovante dans le monde du sport est inimitable et a contribué à son succès. Pour sa part, la Loi sur la Prévoyance Professionnelle n’a connu que très peu de réformes depuis sa création le 1er janvier 1985 et pourrait être plus ambitieuse en termes de communication pour les jeunes générations. Apeurées par un système complexe, celles-ci, ne sont que trop peu intéressées par le système de prévoyance suisse, nous confirment diverses études. Un simple coup d’œil sur les sites web et portails des institutions de prévoyance le montre : souvent absente ou lacunaire, la communication destinée aux jeunes ne permet pas de tisser des liens avec eux. Les nouveautés dans le monde de la prévoyance professionnelle telles que la décomplexisation du système, la digitalisation croissante, la communication Human-to-Human ou encore l’accent mis sur la durabilité constituent une lueur d’espoir.
Auteurs:
Joris Chappatte, MSc en sciences actuarielles, Spécialiste en prévoyance professionnelle, Kessler Prévoyance SA
Tiago Lopes Neves, MSc en sciences actuarielles, Spécialiste IT, Kessler Prévoyance SA
Natalie Koch, Responsable Kessler Prévoyance SA
Une réforme s’impose
La prévoyance professionnelle doit évoluer avec son temps. Avec le « new work », le monde du travail connaît désormais, outre le salariat, de nombreuses formes d’activités (freelances, nomades numériques, travailleurs à temps partiel, à distance, etc.) et la base légale se doit d’être renouvelée. Il est par exemple primordial d’offrir des possibilités de maintien de salaires assurés dans le cas d’une pause éducative, d’une formation ou d’autres objectifs de vie. Les décisions politiques actuelles auront une grande incidence sur les futures retraites des jeunes générations. Malheureusement, ces dernières ne s’intéressent pas assez à ces réformes. Peut-on cependant leur reprocher un certain laxisme ? Pas sûr. Qui aurait envie - ado - de s’intéresser à un système où l’épargne débute à 25 ans ? Peut-on en vouloir au stagiaire ayant un salaire assuré mensuel de 323 CHF de préférer investir dans des bitcoins au lieu de réfléchir quel plan de prévoyance il devrait intégrer ? Il est pertinent de se demander si une cotisation dès les débuts professionnels ne permettrait pas de se projeter plus tôt et d’une meilleure manière dans le futur.
Épargner plus tôt serait judicieux
L’échelle de bonification, la déduction de coordination et le seuil d’entrée ne sont plus adaptés à la situation actuelle. L’échelonnage progressif des bonifications date d’une époque où les caisses de pension en primauté de prestations avaient peur de devoir payer des prestations de sortie trop élevées. Le début des cotisations épargne à 25 ans et un montant de coordination élevé étaient pertinents lorsque les marchés financiers offraient des rendements intéressants. Aujourd’hui, la bourse n’est plus aussi généreuse et l’espérance de vie augmente. Conséquence : le taux de conversion est fortement réduit et les futures rentes sont nettement inférieures à celles de la précédente génération. Permettre aux jeunes générations de mettre de côté des montants conséquents dès leur arrivée dans le monde du travail aurait des effets bénéfiques. Ces fonds pourraient être placés pendant plus de 45 ans. Une plus grande participation aux choix de placements aussi durables que possible susciterait l’intérêt tant intellectuel que financier des jeunes pour la prévoyance professionnelle. Cela impliquerait toutefois d’offrir une véritable éducation sur ce sujet, dès l’école obligatoire, afin de rendre attentifs les jeunes de l’importance de la prévoyance vieillesse, mais aussi décès et invalidité.
De nombreuses caisses de pension en Suisse ont déjà pris une longueur d’avance sur la base légale ; les règlements sont adaptés aux changements sociétaux. Les fondations propres notamment n’hésitent pas à supprimer la déduction de coordination, à débuter l’épargne avant l’âge légal de 25 ans ou à offrir d’autres solutions pour améliorer la prévoyance de leurs assurés.
La communication doit être de qualité
La LPP est un domaine qui touche des personnes de tout âge et de toute catégorie sociale. L’aspect humain ne doit pas être négligé. La digitalisation croissante doit intégrer l’aspect interpersonnel pour bâtir une communication de bonne qualité.
De nombreuses institutions de prévoyance offrent déjà un accès digital, mais il y a encore un grand potentiel d’améliorations. Adapter quotidiennement ses choix de plan, annoncer des rachats règlementaires, un départ, un mariage ou encore avoir accès à des simulations d’événements permettraient aux jeunes assurés d’avoir un accès plus direct à leur propre prévoyance.
Offrir, en supplément, un service Human to Human avec un accès direct à l’information est une solution d’avenir. Un service de Chat online ou encore des possibilités de joindre des spécialistes par vidéoconférence permettraient un contact privilégié avec les assurés. Ce nouveau modèle H2H met l’accent sur l’aspect humain d’une relation et offre une information personnalisée, instantanée et pragmatique au client. Des conseils liés au choix du plan de prévoyance, des rachats autorisés ou des retraits pour l’encouragement à la propriété du logement pourraient être donnés instantanément. Le gestionnaire de la caisse de pension se transforme, l’espace d’un instant, en conseiller en prévoyance afin d’aider au mieux l’assuré.
Par ailleurs, les réseaux sociaux sont de plus en plus utilisés pour s’informer. Une communication subtile et pertinente sur ces canaux, avec des astuces, des explications ou des nouveautés concernant la prévoyance professionnelle, pourrait être une solution gagnante, pour autant qu’elle offre une réelle valeur ajoutée.
La LPP de demain
La Suisse est l’un des pays les plus riches du monde, c’est pourquoi notre prévoyance vieillesse se doit d’être ambitieuse, notamment pour les jeunes générations Une éducation précoce, une approche durable des caisses de pension et l’égalité sont des sujets primordiaux car ils auront un effet bénéfique sur le long terme. Une communication transparente sur les investissements ESG (environnemental, social et gouvernance) que fait une caisse de pension pourrait pousser la jeune génération à s’intéresser davantage à leurs futures rentes. Les investissements durables offrent en effet des rendements très attractifs. Soyons audacieux et offrons une véritable chance à la jeunesse d’épargner grâce à des solutions simples et efficientes !