Les efforts fournis par les entreprises suisses au moment d'élaborer leur rapport de durabilité sont insuffisants. La fondation Ethos a constaté des inégalités et des lacunes dans les documents qu'elle a consultés et appelle de ses voeux un renforcement de la législation.

Pour son analyse, l'institution fondée par des caisses de pension a passé au crible les rapports extra financiers, dits de «durabilité», pour l'année 2023 de 140 entreprises helvétiques cotées en Bourse. A son avis, la qualité de ces documents est insatisfaisante. «Il manque notamment souvent un audit indépendant, des objectifs ambitieux ou des informations essentielles», indique-t-elle dans un communiqué diffusé jeudi.

Partner-Inhalte
 
 
 
 
 
 

Depuis 2024, de nombreuses entreprises doivent produire un rapport de durabilité en plus du traditionnel rapport annuel. Cette obligation découle d'un contre-projet à l'initiative populaire «Pour des multinationales responsables», acceptée en novembre 2020 par une majorité de la population (50,7%), mais ayant échoué devant les cantons.

En tout, seulement 75 entreprises sur les 143 ayant soumis leur rapport de durabilité au vote ont adopté un standard reconnu internationalement pour l'élaboration du document. Des groupes comme le producteur de consommables ophtalmiques Alcon, le géant alimentaire Nestlé, le gestionnaire d'actifs Partners Group, le réassureur Swiss Re et l'assureur Zurich Insurance ne font que respecter partiellement les normes auxquelles ils se réfèrent. Les entreprises ne mentionnant aucun standard sont au nombre de 19.

La fondation déplore également que le recours à un auditeur externe soit «peu répandu». Seules six entreprises cotées à l'indice du marché élargi de la Bourse suisse Swiss Performance Index (SPI) ont validé l'entièreté de leur rapport de durabilité auprès d'une telle institution. Sur le panel, 55 sociétés n'ont fait que vérifier certains indicateurs, tandis que 82 sociétés ont totalement négligé ce point.

Ces documents censés faire la lumière sur l'impact environnemental, l'engagement social et la gouvernance des entreprises pêchent paradoxalement par leur manque de transparence, affirme Ethos.

Des conséquences en cas de refus

Les déclarations concernant les émissions de CO2 sont souvent lacunaires. «Sans ces éléments, il est impossible de définir une stratégie environnementale et climatique suffisamment ambitieuse et crédible pour répondre aux objectifs climatiques mondiaux.» Seules 25 entreprises ont fixé un objectif de réduction à court terme conforme à un scénario d'un réchauffement climatique de 1,5 Grad, qui plus est validé par un organisme indépendant.

Dans son rôle d'actionnaire, Ethos a formulé des recommandations de vote liés aux rapports de durabilité lors des assemblées générales et exercé ses droits de vote en conséquence. «Trop d'entreprises ont soumis leur rapport à un vote consultatif à l'assemblée générale plutôt qu'à un vote contraignant», déplore encore la fondation.

Dans ce contexte, celle-ci soutient «pleinement» le projet de modification du code des obligations actuellement en consultation. Le Conseil fédéral veut faire évoluer le cadre légal en Suisse afin qu'il corresponde à son pendant européen. Il en résulterait un élargissement du nombre d'entreprises soumises à la publication de rapports de durabilité, l'obligation d'adopter un standard international pour l'élaboration de ces documents et la contrainte de recourir à un audit externe pour les certifier.

L'approbation du rapport de durabilité par l'assemblée générale revêtirait un caractère contraignant. Ethos estime cependant que la loi devrait préciser l'impact d'un éventuel refus. Si un telle situation venait à se produire, le conseil d'administration d'une entreprise devrait entamer un dialogue avec ses principaux actionnaires, plaide la fondation. (awp/hzi/ps)