Réunis à Monaco pour les Rendez-vous de septembre, premier round des négociations pour les renouvellements annuels des contrats avec leurs clients assureurs, les réassureurs se montrent déterminés à moins s'exposer à certains périls qui deviennent trop récurrents selon eux, à cause du réchauffement climatique, et trop onéreux car ils touchent des zones urbanisées très habitées.

Les catastrophes naturelles ont coûté 120 milliards de dollars (110 milliards d'euros) au premier semestre 2024, dont la moitié a été couverte par les assurances, selon une estimation du réassureur Swiss Re, et sur ces 120 milliards, les orages et les inondations représentent à eux seuls plus du tiers de la somme, soit 42 milliards de dollars.

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«Les réassureurs vont probablement maintenir des conditions très strictes dans leurs contrats pour limiter leur exposition aux événements climatiques secondaires, les pertes dues aux intempéries étant devenues de plus en plus significatives et volatiles en raison du changement climatique», indique une note de l'agence financière Fitch Ratings.

Celle-ci estime que ce «durcissement des termes des contrats concernant la couverture des catastrophes naturelles est une amélioration structurelle qui devrait bénéficier aux profils de risque des réassureurs et à leur rentabilité à long terme», mais qui laisse les assureurs face à «un risque plus important pour les risques secondaires».

Les réassureurs justifient leur décision en expliquant que ce sont les séismes et les ouragans qui, de plus en plus puissants avec le réchauffement de la surface des océans, provoquent des pics de dépenses inattendus à gérer pour les assureurs. A leurs yeux, les risques "secondaires" comme les inondations ou les orages, qui ne cessent de se multiplier, alimentés par le réchauffement climatique, ne sont désormais plus des aléas mais bien plutôt des dépenses prévisibles pour leurs clients.

Doublement des pertes en dix ans

«Le réchauffement climatique fait qu'un certain nombre de risques qui passaient sous le radar ont commencé à passer au-dessus. Ces dernières années, les averses de grêles, par exemple, ont changé de dimension», constate Bertrand Labilloy directeur général de CCR Re.

Aussi le réassureur a-t-il été "amené après quelques années malheureuses à ne plus réassurer des assureurs qui n'avaient pas passé le bon message leurs clients industriels", comme protéger les parkings de voitures neuves de filets anti-grêle, explique-t-il.

Face à ce nouveau challenge, «il est important qu'en tant qu'industrie, nous développions d'aussi bons modèles de prévision pour ces catastrophes secondaires, que ceux que nous avons pour les catastrophes primaires. C'est tout simplement une priorité», admet-il.

Thierry Léger, directeur général de Scor, craint un doublement en 10 ans du coût des catastrophes naturelles. "Les risques secondaires ont commencé à croître plus vite que les risques primaires depuis les années 2010-2015. Et pour nous c'est une tendance qui va continuer, et à un rythme accéléré, car elle est causée par le changement climatique", a-t-il indiqué à Monaco.

Stefan Golling, membre du conseil d'administration de Munich Re, estime pour sa part que les assureurs devraient se concentrer davantage sur la prévention: «Si vous êtes sûrs que certains éléments interviennent chaque année, vous devez aussi vous concentrer sur une meilleure prévention des risques (...) et plus important encore, vous assurer que les tarifs des primes d'assurance sont adéquats», et cohérents avec les sommes à débourser pour les indemnisations et la reconstruction.

En effet, «si les prix sont trop bas et que le marché n'est pas rentable pour nos clients, avant même de passer par la réassurance, cela ne deviendra jamais rentable même en réassurant le risque», insiste le premier réassureur mondial.

La hausse des coûts pour les assurés pose la question de l'assurabilité de certains risques. Dans «des portions de territoires où la récurrence» des catastrophes devient trop importante, «les assureurs eux-mêmes se retirent», comme en Floride, relève M. Labilloy, laissant alors les assurés sans solution. (awp/hzi/ps)