Cette réforme représente un «danger bien réel» pour le système de santé publique, avance le président du SSP Christian Dandrès. Elle modifie radicalement le mode de financement des soins et donne trop de pouvoir aux caisses maladie.
Les responsabilités des cantons passent entre les mains des assureurs. Non seulement ceux-ci géreraient «les milliards issus de nos primes», mais également «onze milliards de nos impôts». En effet, le projet prévoit que les cantons versent aux assureurs leur part au financement des soins ambulatoires, stationnaires et de longue durée.
Avec cette réforme, les pouvoirs publics se déchargent de leur devoir de garantir le financement des EMS et des soins à domicile, rappelle Natascha Wey, secrétaire générale du SSP.
Ce changement de paradigme va à l'encontre des besoins de la population. Il induit automatiquement une pression financière accrue sur les primes d'assurance-maladie, critique le SSP.
Pour le corps médical, cela conduit également à une nouvelle péjoration des conditions de travail et de la qualité de la prise en charge, a indiqué Friederike Flückiger, infirmière et présidente de la commission santé du SSP.
Contre la logique du profit
Natascha Wey appelle la population à s'opposer à la logique du profit de la réforme. «Les résidents des EMS seraient considérés comme une source de profit, alors que ce sont des personnes vulnérables.»
Cette révision ne fait que «dégrader le système de santé et augmenter les coûts, pour servir les intérêts lucratifs des acteurs privés» abonde le président de l'Union syndicale suisse Pierre-Yves Maillard. «Le but des lobbies du marché de la santé, c'est que l'Etat et la population paient et que les décisions de répartition des ressources échappent au contrôle démocratique.»
Christian Dandrès ajoute que les caisses maladie sont en conflit d'intérêt permanent. Elles sont chargées de l'assurance de base. Mais sont toujours à la recherche de clients pour leurs lucratives assurances complémentaires. «Au lieu de réduire leur pouvoir, le financement uniforme des soins leur donne le contrôle sur tout le système», assène le conseiller national genevois.
Financement des cantons
Actuellement, les cantons, et donc les contribuables, financent les prestations stationnaires à hauteur d'au moins 55%, le reste étant pris en charge par les assureurs-maladie, donc les payeurs de primes. Dans le secteur ambulatoire, les prestations sont assumées à 100% par l'assurance obligatoire des soins.
Les soins ambulatoires étant moins chers que les soins stationnaires, la tendance est aux traitements ambulatoires. Mais cela pousse le coût vers les assureurs.
Le projet prévoit un financement uniforme des prestations ambulatoires et stationnaires entre les cantons et les caisses maladie. Les cantons devront verser 26,9%. Les 73,1% restants seront financés par les assureurs, indépendamment du fournisseur et du lieu où les prestations sont fournies. Il aura fallu quatorze ans au Parlement pour boucler cette réforme. (awp/hzi/ps)